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serge-darre-billets-finances
29 mai 2015

Pourquoi la séparation des activités bancaires doit être réalisée à tout prix

Pourquoi la séparation des activités bancaires doit être réalisée à tout prix

 

A.INTRODUCTION

Cet article fait suite à une autre contribution de Serge Darré in l’article Réduction des crédits immobiliers par la puissance publique

(Cas de l'Espagne)

 

On disait notamment que la crise dite de 2008 n’était absolument pas la dernière : la prochaine est en préparation. On cite : « En Europe de nos jours, par exemple, une crise est vraisemblablement en préparation du fait de la politique hyper accommodante de la Banque Centrale Européenne (pour « soutenir l’activité »). Dans le cas où on peut se refinancer à un taux inférieur à l’inflation, il y a en effet toutes sortes de spéculations. Donc nous aurons une nouvelle crise financière, au mieux qui ne touchera que la bourse ou le secteur immobilier, mais au pire touchant très durement d’autres maillons faibles. »

 

Et c’est grave docteur ? Oui, car ce sont des dizaines ou des centaines de milliards que les États doivent injecter dans leur système bancaire, parfois juste parce que quelques courtiers ont fait des c… Les gouvernements s’endettent ou recommencent à s’endetter, les politiques sociales sont remises en cause et globalement tout le monde s’en trouve un peu plus pauvre, à l’exception, souvent, des banques : véritables nouveaux dieux pour les dirigeants. C’est le mécanisme dit du TBTF en anglais, too big to fail, que l’on peut traduire par trop gros pour laisser mourir.

Dans le même temps, certaines banques ont à peine changé leur train de vie, se contentant, pendant un ou deux ans, de ne pas verser de dividendes et de réduire de moitié les bonus des traders avant que les choses ne redémarrent exactement comme avant. Exception toutefois pour les États-Unis et un peu la Grande-Bretagne où de très lourdes amendes ont été versées par certaines. On peut citer ici :

>  JP Morgan Chase qui a été condamnée à verser 920 millions de dollars d'amendes à quatre régulateurs britannique et américains dans l'affaire dite de la "Baleine de Londres", qui lui avait occasionné 6 milliards de dollars de pertes sur des produits dérivés : JPMorgan a accepté de payer 200 millions de dollars au gendarme boursier américain (SEC), 300

Millions à son régulateur (OCC) et 200 millions à la réserve fédérale (Fed), tandis qu'en Grande-Bretagne, elle paiera 220 millions de dollars à l'autorité boursière FCA. (AFP - 19 septembre 2013)

 

>  Amende de 1,7 milliards de dollars imposée par Bruxelles à diverses institutions financières (UBS, Royal Bank of Scotland (RBS), JP Morgan, Barclays, Société générale et Deutsche Bank) pour ententes portant sur des produits dérivés de taux d'intérêt libellés en yens japonais (AFP)

 

>  Bank of America va payer une amende record de 17 milliards de dollars : Cet arrangement à l'amiable a pour but de solder un litige immobilier remontant à la crise (subprimes). BofA était poursuivie par les autorités américaines pour avoir  menti  à des investisseurs en leur vendant des dérivés de crédits hypothécaires risqués, qui ont généré des milliards de pertes pour les investisseurs qui les ont achetés. Ces prêts toxiques étaient rattachés aux produits financiers complexes RMBS (Residential Mortgage-Backed Securities ) … (Le Monde – août 2014)

Ces banques sont désormais aux abois ? Non, elles vont faire payer les amendes à leurs clients (y compris BNP condamnée à plusieurs milliards pour d’autres raisons) et les dividendes vont continuer à être versés. On peut citer d’autre part le cas de l’assureur AIG qui poursuit le gouvernement US en justice, lui reprochant d’être allé trop loin dans son plan de sauvetage, ce qui a très fortement dilué le capital. Si ce dernier est condamné, combien devra-t-il verser ? Des centaines de millions ou des milliards de dollars ? On n’en a pas fini avec les procédures judiciaires.

Dans ce qui suit on va examiner les mécanismes du risque bancaire et les préconisations à suivre absolument pour contenir non pas absolument mais très fortement la possibilité de revivre des crises telles celle de 2008. On précise que, contrairement aux autres travaux  de Serge Darré où on part généralement d’une page blanche, ne trouvant rien ou presque d’intéressant dans la littérature économique actuelle, ici, on s’appuie en très grande partie sus des travaux de l’OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Économique). Spécialement des contributions d’Adrian Blundell-Wignall, Paul Atkinson et Caroline Roulet. On doit aussi citer les pages finances du Wall Street Journal (WSJ).

 

 

B.QU’EST-CE QUE LE RISQUE BANCAIRE ?

 

Les banques peuvent tout d’abord prendre des risques en prêtant inconsidérément, c'est-à-dire sans évaluer le risque client. Cela a été le cas, bien réel, des banques espagnoles à la suite de la mise en place de l’euro. On a déjà analysé cela et on n’y revient pas. (Cf. Serge Darré : Crise de l’euro dites-vous ?) Ce risque est réel, outre phases d’ « euphorie » immobilière ou autre, chaque fois qu’il y a connivence entre politiques et banquiers, comme c’est encore le cas, par exemple, en Chine où les autorités peuvent ordonner de prêter à certains secteurs, collectivités locales ou entreprises publiques. Mais le reste du temps, cela ne se produit pas car les organismes financiers sont plutôt frileux quand ils s’adressent au grand public et aux PME et ont plutôt la ligne d’horizon tournée vers leur marge d’exploitation. Donc on  le considère, à ce jour, comme faible dans nos démocraties.

(Ceci n’étant toutefois pas gravé éternellement dans le marbre. Si on connaissait un nouveau choc pétrolier avec une inflation à 5% les généralistes se trouveraient en difficulté avec leurs prêts immobiliers à 3% sur 25 ans. Mais d’une part les nouveaux clients paieraient de nouveau 7/8%, d’autre part les gouvernements auraient la possibilité d’intervenir pas voie législative. Cf. Réduction des crédits immobiliers par la puissance publique @S. Darré, mais dans l’autre sens.)

 

Ce qui conduit au risque suivant : le risque de marge, cas où les conditions consenties aux clients ne sont pas suffisantes pour dégager une marge correcte par rapport à celui de refinancement. Ce risque est bien réel quand la banque n’a pas de dépôts, étant dès lors obligée en permanence d’aller chercher du refinancement auprès d’autres ou de la banque centrale. C’est le cas de Dexia, par exemple, banque publique moribonde qui prêtait aux collectivités locales.

Mais pourquoi existe-t-il des institutions comme Dexia ? C’est pour assurer des financements à des acteurs valides économiquement comme les mairies mais qui n’intéressent pas le secteur bancaire traditionnel. Ce sont dès lors des institutions financières spécialisées qui remplissent ce rôle. Il en existe d’autres, indépendantes ou filiales de généralistes, qui sont spécialisées dans le commerce maritime, le pétrole, les achats de laine australienne, la promotion immobilière ou que sais-je encore. Ces institutions ne sont valides à leur tour que si elles connaissent très bien les conditions de rentabilité de leurs clients et maîtrisent les temps spécifiques nécessaires à leurs opérations courantes. Elles doivent aussi être à même à tout moment d’aller chercher leur refinancement à des conditions au minimum pas mauvaises. Ces institutions, indispensables au capitalisme ne deviennent dès lors à risque que gérées par des technocrates incapables (Dexia) ou ayant à souffrir de conjonctures épouvantables. Mais le risque est ici bien réel, précisant toutefois qu’on n’est pas dans l’activité banque de détail.

Définition du refinancement bancaire

Le refinancement consiste, schématiquement, pour un établissement financier, à se procurer les fonds du prêt qu’il vient de consentir à son client. Exemple : prêt immobilier, achat de véhicule. L’établissement n’a pas, en général et en moyenne, à sa disposition la totalité de la somme prêtée ; il doit faire appel au marché. Ceci est vrai aussi pour les banques de dépôts qui ne disposent pas à leur gré de l’argent laissé sur les comptes par les particuliers.

On n’abordera pas ici les concepts de création monétaire ni de multiplicateur du crédit. Ils sont à l’œuvre aussi mais ne modifient pas ce qui est dit par ailleurs.

D’où la définition du risque suivant : risque de crédit. De crédit, confiance en latin. Cela arrive quand les autres banques ne prêtent pas à leurs consoeurs car n’ayant plus ou pas temporairement confiance. C’est le cas pour les banques grecques par rapport à celles de tous les autres pays. Ce fut aussi le mécanisme de diffusion de la crise des subprimes chacun se demandant combien les autres « avaient d’actifs pourris ». Dans ce cas, l’effet boule de neige peut être très rapide et on ne fait bientôt plus confiance à ceux réputés « sérieux » non plus.

 

A partir de là, on va attaquer d’autres risques, mais il existe une méta cause de la profusion de comportements risqués des acteurs qu’il faut aborder maintenant.

La méta cause : une épargne titanesque à l’échelle mondiale

Dire que les riches sont devenus beaucoup plus riches au cours des quinze dernières années est encore en dessous de la réalité. En fait l’industrie du luxe, pourtant florissante, ne parvient même pas à absorber l’enrichissement continu des plus riches. AFP : « Les Femmes d'Alger, une œuvre de Pablo Picasso, est devenu la toile la plus chère jamais vendue aux enchères. Le 12 mai 2015, elle a été adjugée 179,36 millions de dollars, chez Christie's à New York… 15,2 milliards Le chiffre d'affaires 2014 du marché de l’art est un nouveau record –  En un an, il a augmenté de 26 %. Artprice se réjouit d'un résultat  époustouflant, en progression de plus de 300 % en une décennie ».

Mais qui sont ces très riches ? Pas seulement des particuliers.

Il y a tout d’abord les héritiers d’un patrimoine immobilier dans les grandes villes.

Il y a ensuite, variable selon les pays, les bénéficiaires d’un diplôme les protégeant contre la concurrence et les aléas de la vie. Exemples : dentistes, chirurgiens, notaires, conseillers fiscaux et dirigeants d’entreprise. Un facteur d’enrichissement supplémentaire pour eux a été des possibilités accrues d’échapper à l’impôt.

D’u autre côté, il y a les grandes entreprises, bien organisées d’une part pour reproduire la même recette dans n pays, et très favorisées d’autre part par le concurrence fiscale entre les pays qui permet une « optimisation » connue et non moins scandaleuse. Mais l’enrichissement des actionnaires de ces entreprises ne s’explique pas seulement par ces facteurs : il y a aussi les dispositifs mis en place pour les « working poors » aux USA, aujourd’hui singés par le Grande Bretagne et la France qui permet de payer les gens en dessous du salaire minimum, le reste étant pris en charge par la collectivité.

 Certaines multinationales, noyées sous le cash du fait de leur rentabilité intrinsèque ou parce qu’elles perçoivent de plantureux acomptes sur travaux, ont d’ailleurs monté leur propre banque au sein du groupe. C’est le cas de General Electric. Cette pratique étant d’ailleurs à déconseiller dans le long terme. Pourquoi, parce qu’une banque c’est risqué voyons ! Sauf si elle est très grande et reçoit des dépôts auquel cas les pouvoirs public agiront comme assureur en dernier ressort. On a un peu l’impression de boucler ! En tout cas GE cherche actuellement un repreneur pour GE Capital.

S’y ajoutent les « fonds de pension » ; concernent tous les pays où la retraite est réputée s’acquérir par capitalisation. Concerne aussi globalement tout le secteur des assurances ; chaque compagnie ayant pour obligation de faire fructifier ses excédents de trésorerie.

On a aussi les États qui bénéficient d’excédents commerciaux gigantesques et récurrents, profitant du fait que les USA et la « vieille Europe » n’essaient plus de lutter contre les déficits de balances de paiement. C’est le cas, entre autres, de la Chine, Corée du Sud, Singapour et Arabie Saoudite. Ces énormes excédents sont gérés soit sous les contrôle de leurs banques centrales soit pas des fonds souverains dont les plus connus sont le norvégien et le koweitien. On pourrait d’ailleurs, on ne le fait pas ici, inclure dans l’épargne mondiale l’ensemble des réserves prouvées en matières premières et spécialement hydrocarbures puisque ce sont des ressources mobilisables « quand on veut ».

Il y a également, cela fait partie du jeu et doit être cité, tous les capitaux provenant du crime organisé et autres comportements border line ayant pour source la drogue, la prostitution, l’extorsion de fonds, le chantage, les filières d’immigration clandestine, la corruption ou l’évasion fiscale (entre autres). Que l’on songe que, dans les pays du Golfe ou au Pakistan l’usage est de verser 20% des marchés publics aux intermédiaires. Si on se réfère au numéro 940 du magazine Marianne, on voit aussi que la pègre a évolué : aujourd’hui elle ne se contente plus de mettre deux filles sur le trottoir sur les boulevards extérieurs mais a recours à des techniques plus industrielles : ainsi, non exhaustif, arnaque à la taxe Carbonne ou prêts à des entités fictives sous la contrainte des mafias chinoises ou japonaises. Nous sommes désormais au cœur du système financier tant il est vrai que c’est la cause première d’une grave crise bancaire qui affecte le Japon depuis 30 ans.

On a dès lors, juste derrière, car effet aussi bien que cause de cet enrichissement sous-jacent, une hausse des actifs : boursiers, les indices boursiers ne cessent (en moyenne) de crever les plafonds et immobiliers : augmentation de la valeur des biens dans toutes les grandes villes y compris métropoles comme Mumbaï.

L’épargne mondiale, telle qu’on peut l’évaluer aujourd’hui, est supérieure au PIB (c'est-à-dire le revenu annuel) des États-Unis, de l’UE et de la Chine ajoutés. Phénomène que l’on définit comme un excès d’épargne. Supérieure de combien ? De beaucoup mais exactement combien on ne saurait le dire précisément : l’exercice consistant à agréger actifs facilement réalisables et titres non financiers à l’échelle globale n’ayant pas été mené jusqu’au bout et faisant appel aussi à des définitions sur les réserves mobilisables par exemple. En tout cas cela a pour effet que les banques ne peuvent pas vivre bien de leur activité traditionnelle dite d’ « intermédiation » qui consiste à prêter « simplement » à long terme des ressources à court terme.

Pour autant, cette épargne mondiale, pas mal concentrée en Asie par exemple, peut-elle se déplacer comme elle le souhaite ? Venant de la RPC, pas encore mais des capitaux singapouriens pourraient, par exemple, venir faire des prêts immobiliers en France, même si on admet qu’ils sont dans une région du monde de nos jours beaucoup plus attractive etc… C’est le mécanisme qui nous intéresse ici. Une banque asiatique peut le faire et d’ailleurs cela a été fait quand HSBC a fait un chèque pour acheter le CCF. Cette épargne est, dès lors, réellement mondiale sauf là où existent encore des contrôles des changes.

Il n’est dès lors plus possible d’offrir une rentabilité aux actionnaires ou aux épargnants supérieure à, disons, l’inflation + 1% sauf à être plus malin que le marché ce qui, statistiquement, est impossible dans la durée. Toutes les autres opérations, celles qui sont rentables, sont dès lors un peu à extrêmement risquées. C’est dans ce contexte que nous analysons maintenant les autres risques.

Le risque de contrepartie

Supposons une institution financière qui assure son client contre le risque de change. Elle s’adresse à une autre IF qui a un besoin inverse, par exemple celle-ci lui livrera l’équivalent de 4 millions d’euros en reals brésiliens dans 2 mois contre des euros. Le risque de contrepartie c’est justement que l’un ou l’autre fasse défaut sur ses obligations. L’effet domino n’est pas certain sur une opération de ce type, mais il peut se produire s’il y a un effet de contagion. D’autre part chaque IF individuellement doit veiller à ne pas faire face pour sa part à trop d’opérations manquées.

Mais on est ici au niveau d’un risque systématique, possibilité de faillites en chaîne, mais pas encore au niveau de la finance si on ne parle que des couvertures de change. Pour atteindre le niveau de la finance, il faut aller un cran au-dessus. Mais a-t-on dit que les entreprises ne font appel au crédit bancaire que pour les plus petites et celles qui sont purement nationales ? On ne l’a pas dit ? Alors c’est fait : les entreprises d’une certaine taille ne font presque pas appel au crédit bancaire pour leurs investissements ou financement de fonds de roulement. C'est-à-dire que profitant de l’excès d’épargne ci-dessus et de compétences acquises, elles ne font appel aux IF que pour des opérations trop complexes ou risquées pour elles seules.

Quelles sont ces opérations ? Les banques, outre les opérations un peu spéciales décrites ci-dessus (achat de pétrole ..) peuvent faire du conseil en fusions-acquisitions ou en gestion de patrimoine. Activités pas risquées quand elles ne mettent pas elles-mêmes en place des chaînes de Ponzi comme Bernard Madoff. Mais au-delà, on arrive dans des domaines beaucoup plus risqués.

 

Le risque actuariel ou d’engagements

Quand on s’engage à verser des intérêts sensés continuer à grossir dans les années à venir pour se dénouer en rente ou gain en capital on fait un certain nombre d’hypothèses : que la croissance de la région va rester à peu près constante, que les gens ne vont pas partir plus tôt à la retraite, que les cotisants vont continuer à venir, que les prix des actifs vont continuer à augmenter, etc… Mais en fait toute condition apparaissant à peu près sûre aujourd’hui peut ne plus du tout l’être demain en cas de retournement. La difficulté de valoriser ces engagements est extrême. A tel point que les IF prétendent être les seuls à en être capables. Depuis 2008, les banques centrales et autres régulateurs essaient d’évaluer ces risques sous l’appellation de DTD (Distance to Default), appréciation de ce qui pourrait se passer si des facteurs négatifs s’enchainaient jusqu’au point où l’IF n’a plus d’actifs. (La formule de calcul du DTD est dérivée du modèle des Black et Scholes - 1973. On ne prend pas les valorisations données par la banque mais d’autres basées sur les valeurs de marché.)

 

En réalité banquiers et régulateurs n’en savent pas beaucoup plus que tout un chacun. C’est pourquoi ils vont généralement se couvrir contre les aléas dont on est en train de parler. De là le risque suivant :

Le risque de dérivatifs

Étant donné tous les paramètres à prendre en compte ci-dessus, ont été créés toutes sortes de produits de couvertures, basés par exemple sur des indices, ou sur les probabilités que les récoltes soient affectées par le gel ou la sécheresse, ou sur la          possibilité que la république des Mollahs soit renversée en Iran, tout ce que vous voulez ! Le marché des dérivatifs est passé de 8 à 21% du PIB mondial entre 1998 et 2007. La bulle ne cessant de gonfler. Pour autant les opérateurs sur ces marchés ont l’impression de se couvrir ou de rendre service, mais c’est ainsi que l’on ne voit plus que l’on est dans une économie de casino. Le risque est ici extrême pour au moins deux raisons :

  • Les managements des banques ne sont même pas capables de dire ce qui est réellement fait dans leurs salles de marché
  • Ou bien, cas spécialement des hedge funds (entités non régulées), les dirigeants de ces fonds savent bien ce qu’ils font mais comme ils ont toujours (ou croient avoir) un coup d’avance ils ont déjà anticipé leur dissolution pour se lancer dans de nouveaux produits. On estime que leur valeur à ce jour se compte en trilliards de dollars

Le risque de dérivatif est que telle prédiction ne se réalise pas et qu’il n’y ait pas « couverture du couvreur », il n’y a plus dès lors qu’à constater des pertes qui se mesureront en millions, milliards ou dizaines de milliards, au choix !

On a ainsi couvert les principaux risques bancaires et assurantiels, c’est pourquoi on a parlé d’IF. Les autres risques nous paraissent des dérivés de ceux-là ou les mêmes avec une autre formulation. Un risque de marge sur un prêt immobilier peut devenir aigu suite à un échec d’une contrepartie, qui résulte lui-même d’un mauvais calcul sur le marché des dérivatifs, etc...

On est allé, dans des conditions « normales », du moins au plus risqué et ce qui est apparu ainsi c’est que les plus grands risques étaient fort loin de la gestion des comptes des particuliers, hors assurance vie mais il s’agit d’un contrat privé dont les particuliers devraient savoir qu’ils n’offrent au final pas plus de garanties que les discours des hommes politiques. D’où l’idée simple d’un cantonnement : la finance de base avec les comptes de dépôts d’un côté, tout le reste avec des rémunérations supérieures mais beaucoup de risques d’un autre côté. On va maintenant voire la méthode générale de régulation pour y parvenir.

 

 

C.METHODE GENERALE DE SEPARATION DES ACTIVITES Bancaires

La méthode générale est de mettre en place des entités juridiques bien distinctes au sein des groupes bancaires. Mais on dira que cela existe déjà : les salariés de Natixis par exemple ne sont pas dans les mêmes locaux et ne font pas du tout la même chose que ceux des agences de la Caisse d’Épargne, tout en appartenant au même groupe BPCE.

Il s’agit en fait que les activités à risque, celles de banque de financement et de gestion d’actifs « n’héritent pas » des garanties attachées à l’appartenance au groupe. Autrement dit, la banque de détail ou le groupe doit bien spécifier qu’elle n’apportera pas sa caution aux opérations de la filiale financement.

Il s’agit que cette, pour simplifier on la considère unique, IF d’investissement apparaisse dans les transactions avec ses pairs pour ce qu’elle est, fonction de la taille de son bilan propre. Elle ne pourra pas non plus se financer auprès de la BD (banque de dépôts) du groupe, ce qui serait un moyen de contourner le mur de séparation mais seulement sur le marché de gros, même si, on est d’accord, cela lui revient plus cher. Les directions générales des ensembles bancaires devront dès lors se transformer en pures holdings. Les activités bancaires étant dès lors complètement séparées, les activités communes pourraient se limiter à la formation interne, les équipes de gestion des risques, des fonctions support dont gestion du parc immobilier. A la rigueur pour certains clients CSP+ ou grosses PME, un guichet unique commercial mais renvoyant derrière sur des interlocuteurs bien distincts.

La holding, pour que chaque entité puisse faire son métier spécifique « dans son coin », doit rester petite, limitée à la stratégie générale et de la supervision. On préconise que la loi interdise un effectif de plus de 300 personnes. Les commissaires aux comptes devront être différents pour les différentes entités du groupe.

Dès lors, cependant, les plus grandes IF sont violemment opposées à ces règles car cela va les obliger à mieux valoriser leurs risques et par suite à réduire considérablement leurs bilans, c'est-à-dire en clair à devenir plus petites. Or on a vu que la vraie rentabilité bancaire prenait sa source dans les activités les plus risquées. Deux catégories d’objections peuvent être apportées à cela :

  1. Si les banques sont des quasi services publics      car si importantes pour le financement donc la vie des économies ce qui      justifie leur renflouement, par voie de conséquence, il n’y a pas de      raison de leur laisser faire ce qu’elles veulent
  2. Elles auront, d’autre part, la possibilité de      faire du ménage dans leur kyrielle d’activités, toutes n’étant pas      rentables. Il existe aussi la possibilité d’exfiltrer telle ou telle      activité en filiale de rang trois ou quatre

Les bilans au total vont bien sûr se réduire si on prend la règle fixée par l’OCDE : typiquement, la banque d’affaire récupérerait 20% du capital de l’ensemble, elle doit respecter un effet de levier de 2% et a un rapport 50/50 entre dérivés et actifs. La banque de dépôts récupère 80 % du capital et a droit à une certaine proportion de dérivatifs pour couvrir ses risques. Le critère majeur d’affectation entre l’une et l’autre est de respecter un effet de levier de 5%. Donc, étant moins gros, moins de profits mais on peut vivre ainsi.

Une période transitoire serait évidemment à prévoir : pas moins de deux ans et pas plus de trois. On préconise une durée de trente-deux mois maximum. Les capitaux propres pouvant diminuer, il faudra pendant ce temps réduire le nombre d’actions. Les IF pourront à cet effet commencer par les titres d’autocontrôle. Pour les autres, les pertes encourues lors de l’achat des actions à des tiers  seraient à amortir en frais d’Établissement sur cinq ans selon la méthode indiquée dans le document cité : « Réduction des crédits immobiliers par la puissance publique »

 

Par ailleurs, ces dispositions, même entrées en vigueur, ne suppriment évidemment pas le risque systémique venant de banques d’autres pays qui n’ont pas adopté ce type de mesures. Cependant, la France, comme en 2008/2009, peut être relativement peu touchée dès lors que les banques de dépôts font essentiellement des prêts en euros, à partir d’une épargne nationale, non gagés sur des titres hypothécaires. Quid de Dexia qui s’approvisionnait en francs suisses ? Ce type d’établissement doit effectivement mourir.

On ne traite pas non plus du risque touchant les banques de dépôts. Or ce type d’établissement a été très fortement touché dans des pays comme l’Espagne et l’Irlande du fait de leurs prêts immobiliers inconsidérés. Il est évident là aussi que la loi sur la Séparation des Activités doit s’accompagner d’autres dispositions prudentielles comme celles que nous indiquions dans le document : « Crise de l’euro dites-vous ? » @Serge Darré,c'est-à-dire mise en place par le Système Européen des Banques Centrales de mesures d’encadrement du crédit dès lors que celui-ci favorise la spéculation immobilière. D’autre part, on convient que des excès d’épargne d’un coté comblent des insuffisances ailleurs, mais est-il justifié que des prêts immobiliers de particuliers espagnols ou hongrois soient libellés en Livres ou francs suisses. Des dispositions devraient exister pour qu’une partie seulement de ces prêts puissent avoir une origine autre que nationale (ex. 25%).

 

En cas de faillite ou même seulement d’extrême difficulté de l’une des sociétés du groupe, la législation doit aussi évoluer pour contraindre la holding à la vendre ou la fermer au plus vite, c'est-à-dire hors obligations légales s’appliquant normalement dans ce cas comme les procédures de sauvegarde. C’est une condition essentielle pour que le groupe ne traine pas éternellement des « zombies » comme les banques japonaises.

Rappelant ici, en guise de conclusion, que l’idée avait été émise par les régulateurs, britannique et US, d’obliger les établissements financiers à rédiger leur « testament » en cas de pertes importantes. On s’accorde aujourd’hui pour dire que cela ne fonctionnera pas (Cf. Alter Eco), même là où les documents sont devenus obligatoires (loi de réforme financière Dodd-Franck)  en raison d’une imbrication extrême, définie en particulier pour réduire l’impôt. La seule solution est dès lors une séparation par métiers avec obligation de se débarrasser très vite des branches malades.

 

 

 

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serge-darre-billets-finances
  • L'auteur, a rédigé : "Les ressorts de l'activité économique au début du XIXèsiècle" Economiste non professionnel, lassé d'entendre des analyses pré digérées et réchauffées, a voulu raisonner par lui même et utiliser toutes les statistiques disponibles.
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